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Photo du rédacteurDr François Bilodeau

Événement traumatique: quand les mots des proches font tout aussi mal

Insidieux et dévastateurs, les commentaires peuvent profondément bouleverser une victime et contribuer à aggraver les symptômes.

Plus de 70% des individus seront exposés à un événement traumatique au cours de leur vie.

«Voir que tu as décidé de te baigner là, c'est évident que c'était dangereux!»; «Moi, je me serais défendu!»; «T'avais qu'à lui remettre l'argent et ça aurait évité bien des problèmes!»; «Évidemment, quand tu sors à cette heure de la nuit, tout peut arriver!»; «Il ne veut pas s'en sortir, il n'essaie même pas de retourner travailler!»; «Me semble que j'aurais essayé de crier plus fort!» ou même «Quand on est imprudent, c'est ça qui arrive!»...


Un événement est considéré comme traumatique lorsqu'il implique une menace de mort, une menace grave à son intégrité physique ou encore lorsqu'il s'agit de violences sexuelles. Le potentiel traumatique peut émerger lorsque l'individu est la victime principale ou le témoin direct de l'événement traumatique ou bien lorsqu'il apprend que cela est arrivé à un proche.


Plusieurs événements peuvent être catégorisés comme étant traumatique: les actes de violence interpersonnels (exemples: les agressions physiques, les agressions sexuelles, les vols à main armée, les séquestrations, les guerres), les accidents (quasi noyade, les incendies, les accidents de voiture, les accidents de travail ou de sport, les explosions) ou les catastrophes naturelles (les ouragans, les inondations, les tempêtes, les tremblements de terre, les feux de forêt, les tornades).


La probabilité d'être exposé un jour à un événement traumatique est relativement élevée. Une récente enquête canadienne révèle que près de 76% des individus feront l'expérience d'au moins un événement traumatique au cours de sa vie. De ces personnes, entre 25% et 35% développeront un état de stress post-traumatique.


Il existe plusieurs facteurs de risque lié au développement d'une problématique anxieuse après avoir été exposé à un événement traumatique. Parmi ceux-ci se trouvent les réactions indésirables de l'entourage (et celle de la société) face à la victime. Insidieux et dévastateurs, les commentaires peuvent profondément bouleverser une victime et contribuer à aggraver les symptômes. Il s'agit des blessures secondaires.


Les réactions et le soutien de l'entourage


Le soutien de l'entourage est souvent crucial dans la convalescence après avoir été exposé à un événement traumatique. La victime peut se sentir fragile, démunie et confuse. Malheureusement, il arrive parfois que les réactions de l'entourage exacerbent les symptômes post-traumatiques de la victime.


Les réactions négatives de l'entourage peuvent être multiples telles que le fait de ne pas croire ou de minimiser l'expérience de la victime: «Tu exagères! Ce n'est pas possible!» Il est également possible que les proches portent des commentaires visant à blâmer la personne traumatisée: «C'est ce qui arrive quand on sort tard le soir!» Des commentaires peuvent aussi être portés dû à un manque de compréhension concernant les conséquences liées à un trauma: «Bien voyons, pourquoi ne veux-tu pas te baigner, tu es bien peureux.»


Ce manque de soutien et ces réactions de la part de l'entourage peuvent mener la victime à vivre un sentiment de peine, de honte, de culpabilité, de colère ou un sentiment d'injustice.


C'est normal de réagir ainsi.


Pourquoi mon entourage réagit-il ainsi?


D'abord, ce n'est pas de votre faute. Vous n'êtes pas responsable de ce qui vous arrive et vous n'êtes surtout pas responsable des comportements de vos proches. Les gens qui n'ont jamais vécu un événement traumatique peuvent avoir de la difficulté à comprendre la réalité d'une victime. Parfois, il est plus facile pour l'entourage de nier la réalité que d'accepter de faire face à la détresse que cela a pu causer. Pourquoi? Comment expliquer que les autres me blâment ou minimisent ce que j'ai vécu?


Blâmer la victime a une fonction souvent protectrice pour les autres: cela permet de garder intactes ses croyances fondamentales en un monde sécuritaire. En ce sens, affirmer que ce sont les comportements de la victime qui sont responsables du traumatisme, permet de préserver l'illusion qu'une telle chose ne peut pas nous arriver.


Pour la société, il est aussi malheureusement plus sécurisant de croire que la victime a fait quelque chose qui a provoqué l'événement, afin de garder intacte la croyance en un monde juste et bon au sein duquel les événements positifs sont plus fréquents que les événements négatifs.


Un manque de soutien de l'entourage ou des comportements négatifs à l'égard de la victime aggravent les symptômes post-traumatiques.

Conseils aux victimes et aux proches


À la suite d'un événement traumatique, il est essentiel que la victime soit soutenue, comprise et entendue. Pour les proches, offrez un soutien émotionnel: écouter la personne, essayer de la comprendre, donner de lui de l'affection et de la tendresse. Plus encore, offrez également un soutien technique: donnez des conseils, rendez service, préparez un repas ou aidez financièrement la personne.


Pour les victimes, n'hésitez pas à communiquer vos besoins à votre entourage et de vous affirmer lorsqu'un commentaire négatif vous est porté.


Il est également important de bien saisir les processus psychologiques associés à un trauma. À cet égard, une lecture incontournable pour mieux comprendre les blessures secondaires et les symptômes post-traumatiques est le livre intitulé: Se relever d'un traumatisme: réapprendre à vivre et à faire confiance.



 

RÉFÉRENCES


Brewin, C. R., Andrews, B., & Valentine, J. D. (2000). «Meta-analysis of risk factors for posttraumatic stress disorder in trauma-exposed adults». Journal of consulting and clinical psychology, 68(5), 748.

Brillon, P. (2013). «Comment aider les victimes souffrant de stress post-traumatique: guide à l'intention des thérapeutes». Les Éditions Québec-Livres.

Van Ameringen, M., Mancini, C., Patterson, B., & Boyle, M. H. (2008). «Post‐traumatic stress disorder in Canada». CNS neuroscience & therapeutics, 14(3), 171-181.

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